Jean Charles Levesque, dit Petit JeanJean Charles Levesque, dit Petit Jean
©Jean Charles Levesque, dit Petit Jean|Antoine Surville
Jean-Charles LévesquePetit-fils de Terre-neuva

Jean-Charles Lévesque

Petit Jean et la Grande Pêche

Découvrez le portrait de Petit Jean – Jean-charles Lévesque de son vrai nom – habitant de la Haute Ville de Granville, petit-fils de Terre-neuvas passionné par l’histoire de la Grande Pêche.

À la rencontre de

Petit Jean

D’où vous vient cet intérêt pour le monde de la Grande Pêche ?

Lorsque j’étais jeune, ma grand-mère me disait toujours « ton grand-père est allé au Canada ». Je suis en effet petit-fils de terre-neuvas : mon grand-père était sur le François-Charles et son beau-frère était capitaine du navire La Thérèsa, l’avant-dernier terre-neuvier.

Petit à petit, j’ai donc commencé à m’intéresser à la Grande Pêche, et notamment la présence des pêcheurs à Saint-Pierre-et-Miquelon. J’avais d’ailleurs commencé une correspondance avec Madame Lefèvre, qui était institutrice sur place et qui m’apprenait toutes sortes de choses sur les lieux. Et en 1985, j’ai commencé à en avoir marre de mon travail chez EDF et je suis donc allé à Saint-Pierre-et-Miquelon. Je ne vous dis pas la réaction de mes parents et de ma femme !

Et c’est donc en effectuant ce voyage que j’ai découvert que mon grand-père n’était pas allé au Canada, comme disait ma grand-mère, mais justement à Saint-Pierre-et-Miquelon ! Et alors pour moi ça a été ma plus grande joie à l’époque : je dois vous avouer qu’une fois arrivé sur place, j’avais une boule à la gorge, j’étais très ému.

À Saint-Pierre-et-Miquelon, je suis resté aux archives pendant 80 jours, et j’ai remonté toutes les familles d’origine normande, et notamment du Sud-Manche. C’était un vrai travail de passion.

Vous avez d’ailleurs écrit plusieurs livres sur le sujet !

Oui, j’ai fait mon premier livre en 1982, c’était un livre de cartes postales sur la Grande Pêche (Granville et la pêche au temps des Terre-neuvas). Je l’avais surtout fait pour la population locale, et il a eu beaucoup de succès !

Après, j’en ai écrit un deuxième sur Granville (Granville, images et traditions du passé), avant d’en faire un autre sur la Grande Pêche à la demande des habitants de Saint-Pierre-et-Miquelon (Saint-Pierre-et-Miquelon, des images et des hommes). Je leur avais d’ailleurs fait une promesse sur ça, et le vrai granvillais n’a qu’une seule parole : lorsqu’il dit, il dit !

En plus de ça, je fais un recensement de tous les bateaux granvillais : j’en suis actuellement à 2000 bateaux recensés, dont certains qui ne partaient pas de Granville mais du Havre. Du fait du « problème » des marées à Granville, il était en effet parfois nécessaire pour certains bateaux d’être armés au port du Havre : à cette époque-là, vous aviez souvent des navires qui faisaient jusqu’à deux fois le tonnage du Marité. Par exemple, le Jacques-Cœur qui faisait 760 tonneaux (contre 249 pour le Marité). Mais tous ces bateaux étaient propriétés de familles d’armateurs granvillais.

J’ai aussi traité de la disparition des marins : il y avait bien sur les naufrages, à peu près 350 sur les 2000 bateaux trouvés. Mais il y avait aussi la démence, les problèmes de mélancolie et d’alcool. Sans oublier les morts dans les doris, liées à la brume, au vent ou autre.

Lorsque vous avez acquis la maison dans laquelle vous logez actuellement, vous-êtes-vous intéressé à la famille qui y vivait jadis ?

Alors j’ai effectivement effectué quelques recherches sur la famille Dry – ancienne famille de corsaires, qui dans les années 1700 était apparentée avec les Couraye-Duparc, et qui a armé pas mal de bateaux. Mais moi mon gros problème, c’est que je ne m’intéresse qu’aux petites gens qui ont fait la pêche. Je m’intéresse aussi aux armateurs, mais je ne m’appuie pas forcément sur l’histoire des corsaires et des grands noms. Je me tourne plus facilement vers les gens du travail, les travailleurs de la mer. Après tout, s’il n’y avait pas eu les équipages, il n’y aurait pas eu de Grande Pêche.

Avez-vous toujours vécu dans la Haute Ville ?

Sachez qu’à un moment je me suis expatrié : j’ai fait un voyage de trente kilomètres, à Avranches ! Mais il n’y avait pas la mer. Je revenais donc toujours à Granville.

Comment voyez-vous votre rôle aujourd’hui en tant que descendant de terre-neuvas ?

C’est à nous de rétablir l’importance de la Grande Pêche à Granville, et l’importance de l’implantation normande à Saint-Pierre-et-Miquelon. Sachant qu’à une époque Granville et Saint-Malo représentaient 60% de la pêche morutière française ! Je fais donc souvent des conférences, notamment lors d’événements comme le Festival des Voiles du Travail.

Et ce qui est intéressant lors de ces conférences, c’est qu’il y a beaucoup d’échanges : toutes les familles installées dans un rayon de 40km autour de Granville avaient un terre-neuvas parmi leurs ancêtres. Et beaucoup de marins venaient de l’arrière-pays, de Mortain jusqu’à Barneville-Carteret. C’est pour ça aussi que je m’intéresse aux petites-gens.

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